Dame Nature est en grande partie responsable de la popularité des cabanes à sucre dans notre région du globe. En effet, les érables adorent les hivers rigoureux et pour que leur sève commence à couler au printemps, ils ont besoin d’une température froide, la nuit, et du soleil, le jour. C’est exactement ce que leur fournit le climat québécois à l’arrivée des beaux jours. Ce que nous appelons le « temps des sucres » se situe généralement entre la fin février (ou début mars) et la fin avril (ou début mai). La plus douce des traditions locales se perpétue ainsi depuis des générations.
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Le sirop d’érable en chiffres
Le Canada produit près de 75 % de l’offre mondiale de sirop d’érable pur et le Québec à lui seul assure 86,8 % de la production canadienne (c’est 72 % de la production mondiale). En 2022, les 13 300 acériculteurs québécois ont produit 211 millions de livres de sirop. Le sirop d’érable est un produit local et renouvelable et près de la moitié de la production d’ici est biologique. C’est aussi le meilleur au monde, et nous l’exportons dans plus de 60 pays.
© Sucrerie de la Montagne
Un peu d’histoire
Commençons par un bref rappel historique. Les premiers colons ont remarqué que les Autochtones fabriquaient du sirop d’érable au printemps et que la forte teneur en calories de cet aliment leur permettait de survivre aux longs mois d’hiver. Ils ont alors mis au point diverses techniques pour améliorer le mécanisme rudimentaire d’entaillage des érables et de fabrication du sucre d’érable, la forme sous laquelle ils conservaient la précieuse sève (le sirop est arrivé plus tard). Pour le consommer, ils coupaient le sucre en tranches ou en morceaux qu’ils râpaient ou faisaient fondre directement dans leurs plats. Aujourd’hui, la sève d’érable (aussi appelée eau d’érable) est prélevée puis bouillie jusqu’à ce qu’elle se transforme en sirop. On pense que les premières cabanes à sucre sont apparues dans les années 1860 et que les premiers repas y ont été organisés pour des urbains en mal de campagne et de sirop.
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Soupe aux pois et tire : que mange-t-on à la cabane à sucre ?
Des produits de l’érable, naturellement ! En fait, tous les aliments baignent dans le sirop d’érable. Un repas de cabane à sucre, pour le lunch ou le brunch, n’est pas une mince affaire et vous devez vous mettre en appétit en vue d’un copieux et délicieux repas à saveur d’érable qui ne laisse personne sur sa faim. Petits conseils d’ami : portez un pantalon à taille élastique, allez-y avec des amis et mangez lentement si vous voulez tenir le coup jusqu’à la fin du festin. C’est un marathon et non un sprint, il faut donc y aller doucement pour goûter à chaque plat et ne pas abuser du pain.
À la cabane à sucre, le repas commence invariablement par une généreuse portion de soupe aux pois au jarret de porc. Suivent une myriade de mets traditionnels comme le jambon, l’omelette ou les œufs brouillés, les saucisses, la tourtière (le fameux pâté à la viande), les fèves au lard, les cretons (cela ressemble à des rillettes) et les « oreilles de crisse », de la couenne de porc frite. Miam ! Tous ces plats sont apprêtés à l’érable. Vous devez absolument verser du sirop sur tout, même sur votre tranche de pain beurrée.
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Gardez un peu de place pour les desserts !
Et que dire des desserts : tartes au sucre, beignets et crêpes à l’érable et bien d’autres douceurs qui feront la vie dure à vos dents ! Le comble de cette orgie de sucre est sans contredit la tire d’érable. À la fin du repas, on verse du sirop bouillant sur de la neige compactée en formant de petites bandes dorées. L’idée, c’est de laisser le sirop durcir sur la neige, puis de rouler la tire sur des bâtonnets de bois et de la déguster comme une sucette. Petits et grands adorent ce rituel, et il serait impensable d’aller à la cabane à sucre sans déguster de la tire d’érable.
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Activités et divertissement : que faire à la cabane à sucre ?
À part manger, que fait-on à la cabane à sucre, demandez-vous ? Les activités varient d’un endroit à l’autre. Au Québec, la plupart des cabanes sont des entreprises familiales, petites ou moyennes, mais il existe aussi d’immenses salles commerciales. Certaines cabanes traditionnelles proposent des promenades dans l’érablière en carriole tirée par des chevaux ou un tracteur, des randonnées pédestres, des excursions en forêt, de la musique et des danses traditionnelles, une visite aux animaux de la ferme, des balades en raquettes et des démonstrations de la fabrication du sirop. On peut parfois faire une dégustation d’eau d’érable, la sève qui coule des arbres. Il faut 40 litres d’eau d’érable pour faire 1 litre de sirop. Vous avez donc le choix entre de grandes salles à manger ou des salles plus intimes dans de petites cabanes. Tout dépend de l’expérience que vous souhaitez vivre et de la taille de votre groupe.
© Cabane à Pommes à l'érable Labonté de la Pomme -temps des sucres
Quelle cabane à sucre choisir dans la région montréalaise ?
Les cabanes à sucre sont tellement nombreuses et si différentes les unes des autres qu’un choix est parfois difficile à faire. Naturellement, la plupart des cabanes sont situées dans des érablières hors de la ville. Nos préférences vont de la traditionnelle Sucrerie de la Montagne à la crème de toutes, Au pied de cochon, qui, malheureusement, affiche souvent complet. Pour une expérience gourmande avec un accent de fraîcheur, Labonté de la pomme présente la toute première Cabane à pommes du Québec et met à l’honneur les produits du terroir et d’autres gourmandises sorties du four à bois. Les propriétaires de ce verger familial situé à Oka, à 45 minutes de route de Montréal, proposent une foule d’activités familiales tout au long de l’année et tiennent un magasin général où acheter des cadeaux gourmands. La Cabane à pommes (et à l’érable) est ouverte durant le temps des sucres, en mars et avril, mais aussi à d’autres périodes et pour d’autres occasions, le restant de l’année.
Si vous ne pouvez pas sortir de la ville au début du printemps, les cabanes à sucre urbaines qui ont proliféré au cours des dernières années satisferont vos rages de sucre d’érable au sortir du long hiver. Des restaurants proposent aussi des petits-déjeuners ou des brunchs à l’érable ou un repas printanier s’inspirant de ceux des cabanes à sucre. Certaines cabanes et des restos offrent même la livraison d’un repas typique. Quel que soit votre choix, assurez-vous de réserver. Cette expérience gastronomique (et gargantuesque) est très populaire et elle ne dure que quelques semaines par année, de la fin février à avril. Les cabanes se remplissent donc très, très vite.
Bon appétit !
Mayssam Samaha
Rédactrice et blogueuse (Will Travel for Food) spécialisée dans le voyage et la gastronomie, Mayssam Samaha parcourt le monde entier à la recherche de sa prochaine découverte culinaire. De l’Islande à l’Afrique du Sud, elle a visité une trentaine de pays, et rien ne lui fait plus plaisir que de déambuler dans les marchés d’une ville étrangère. Elle est également l’instigatrice de SAISONS, une série de repas mettant à l’honneur les chefs et les ingrédients québécois.